L’ancienne gravière de Maison-Neuve située sur les communes de Saint-Chamassy et du Buisson-de-Cadouin en Dordogne, vient d’obtenir un soutien de la Fondation du Patrimoine à hauteur de 60 000 €. Une aide qui finance les travaux et la valorisation de ce site auprès du grand public, notamment par la création d’un belvédère et d’un affût d’observation.

Lauréate dans la catégorie « Nature aménagée et biodiversité », l’ancienne gravière de Maison-Neuve constitue un site emblématique du programme LIFE rivière Dordogne qui ambitionne de restaurer des milieux alluviaux de la Dordogne sur 280 km de rivière, tout en soutenant le maintien d’activités humaines (baignade, agriculture, eau potable, etc.). Ce site privé a fait l’objet d’une acquisition foncière par EPIDOR afin d’être renaturé dans son intégralité. Les travaux ont consisté à reconnecter un bras mort à la rivière Dordogne, abaisser les berges pour permettre le débordement des eaux en cas de crue, combler un ancien bassin d’extraction et permettre le retour d’une végétation typique des bords de rivière (saules blancs, peupliers noirs, frênes). Cette restauration concilie le maintien d’une activité agricole dans la plaine alluviale sous forme de prairie à fauche tardive.

L’aide accordée par la Fondation du Patrimoine, d’un montant de 60 000 €, soutient une partie des travaux réalisés et servira à la réalisation d’équipements pédagogiques permettant la découverte du site par le grand public, via notamment la création d’un belvédère et d’une zone d’observation de la biodiversité.

Nouveau logo de la Fondation du Patrimoine © La Fondation du Patrimoine

Dès sa création, en 1996, la Fondation du patrimoine a reçu pour mission de préserver le patrimoine naturel français que constituent la biodiversité, les paysages et les terroirs. En 2009, le programme « Patrimoine naturel et Biodiversité » est créé pour soutenir des projets luttant contre l’érosion de la biodiversité et le changement climatique.

Ce sont plus de 380 projets qui ont été soutenus jusqu’alors, avec 20 nouveaux lauréats désignés en 2024 situés dans 13 régions de France et se partageant une enveloppe globale d’1 million d’euros.
Le programme « Patrimoine naturel et Biodiversité » porte à la fois sur des projets d’éco-restauration de patrimoine bâti et de sauvegarde d’espaces naturels fragiles, réservoirs de biodiversité.

Trois grandes catégories de projets peuvent être accompagnés :

  • Bâti, éco-restauration & biodiversité : restaurer le bâti, en utilisant des matériaux locaux et respectueux de l’environnement, en prenant en compte la biodiversité du bâti, et en favorisant la sobriété énergétique de l’édifice.
  • Nature aménagée & biodiversité : protéger la faune et la flore autour du bâti, restaurer et valoriser les parcs, jardins, renaturer et désimperméabiliser les sols.
  • Espaces naturels, littoraux & biodiversité : préserver les paysages, les espaces naturels et les habitats d’espèces rares ou menacées, végétales ou animales.

Gérard Biraud, Délégué Sud-Ouest de la Fondation du Patrimoine, lors de l’inauguration du soutien de la Fondation du Patrimoine au chantier de l’ancienne gravière de Maison-Neuve, sur les communes de Dordogne de Saint-Chamassy et du Buisson-de-Cadouin, le 22 janvier 2025.
Crédits © EPIDOR

Travaux de renaturation de l’ancienne gravière de Maison-Neuve en septembre 2024 © EPIDOR

Sur la plaine alluviale de Maison-Neuve, pendant près de deux siècles, différentes phases d’exploitation et d’aménagement ont progressivement réduit les espaces où la flore et la faune caractéristiques des milieux alluviaux pouvaient se développer. Autrefois fréquemment visitée par les eaux, la plaine a été remodelée, devenant un espace très homogène d’un point de vue écologique et peu connecté avec la rivière.

Des travaux importants ont été réalisés dans le cadre du programme LIFE rivière Dordogne, coordonné par EPIDOR, pour restaurer 22 ha de milieux alluviaux.

Ces travaux ont consisté à :

  • Contenir avant les travaux les espèces végétales exotiques recensées sur le site : l’Érable negundo et la Jussie aquatique;
  • Réaliser des terrassements en déblai sur les terrains proches de la rivière pour environ 50 000 m³ afin de permettre une inondation plus fréquente;
  • Reprofiler les berges avec des pentes et des expositions diversifiées, respectant des formes naturelles ;
  • Combler un ancien bassin d’extraction;
  • Agrandir le bras mort existant sur 300 m de long;
  • Réinjecter des sédiments issus des décaissements dans le lit de la rivière, soit environ 30 000 m³ de graviers positionnés dans les zones d’eaux courantes pour réalimenter des sites de ponte des poissons;
  • Maintenir des essences d’arbres patrimoniaux (peupliers noirs, ormes, saules blancs, frênes).

Suivi scientifique des habitats naturels restaurés  © EPIDOR

Une fois renaturée, l’ancienne gravière de Maison-Neuve devrait accueillir un plus grand nombre et une plus grande diversité d’espèces animales et végétales.
Des inventaires naturalistes effectués avant travaux ont permis de dénombrer 19 espèces dites d’intérêt communautaire, c’est-à-dire menacées à l’échelle européenne.

Après les travaux, il est attendu d’observer sur le site :

  • 10 habitats d’intérêt communautaire européen,
  • 300 espèces de plantes dont 26 d’intérêt patrimonial, dont 5 protégées et 3 menacée,
  • 71 espèces animales dont 8 d’intérêt patrimonial : la Loutre d’Europe, le Héron cendré, l’Aigrette garzette, le Grand cormoran, le Grèbe castagneux, le Petit Gravelot, le Martin pêcheur et l’Hirondelle des rivages.

Parmi les autres espèces animales, citons :

  • 18 espèces de poissons dont 3 d’intérêt patrimonial : le Brochet, l’Anguille, la Bouvière, le Toxostome, La Lamproie marine et la Grande Alose
  • 15 espèces de papillons dont 1 espèce d’intérêt patrimonial : l’Écaille chinée, le Cuivré des marais, le Damier de la Succise
  • 17 espèces de libellules dont 4 espèces d’intérêt patrimonial : l’Œdipode aigue-marine, l’Anax napolitai, le Gomphe de Graslin, la Cordulie à corps fin.

    Bras et habitats naturels restaurés de la rivière Dordogne dans le cadre du programme LIFE  © EPIDOR

    Des bénéfices pour le milieu sont également attendus. Il s’agit notamment d’améliorer la qualité des espaces naturels. La reconnexion avec la Dordogne d’une zone humide présente sur le site permettra de la rendre plus fonctionnelle lors des débordements de la rivière.
    Cette renaturation permet également d’augmenter la surface de milieux naturels propices à l’implantation et à la vie d’animaux et de végétaux, notamment :

    • une prairie alluviale de 14 ha gérée en fauchage tardif par un agriculteur et propice à l’implantation d’une flore caractéristique de la prairie d’intérêt communautaire (Natura 2000), habitat potentiel pour des espèces de type papillons (Damier de la succise, Cuivré des marais) et territoire de chasse pour les chauves-souris et les libellules (Gomphe de Graslin).
    • un bras mort dont la surface est augmentée de 150% propice à :
      la reproduction de poissons (brochets, bouvières)
      la vie des batraciens (crapauds, grenouilles)
      la vie des reptiles (couleuvre verte jaune, couleuvre vipérine).
    • des habitats favorables à l’implantation d’espèces d’oiseaux: Martin pêcheur et Hirondelle des rivages sur les berges sableuses abruptes, Petits Gravelots sur les grèves de galets, Hérons dans les saulaies et Grues cendrées et cigognes au niveau de la prairie humide.
    • des frayères reconstituées dans le lit vif de la rivière pour des espèces piscicoles protégées comme la Lamproie marine, le Toxostome, la Grande Alose, le Chabot.
    • des corridors écologiques (trame verte) renforcés en qualité et en surface avec la plantation de 10 000 arbres et arbustes propices aux chiroptères arboricoles, à la Loutre d’Europe et autres micromammifères, aux passereaux.

    Cet espace nouvellement renaturé devrait fournir des bénéfices favorables aux activités humaines, notamment grâce à:

    • un espace d’épanchement des crues sur 22 ha ;
    • un espace utile à l’autoépuration de la ressource en eau permettant des coûts évités de dénitrification estimés de 200 000 à 250 000 euros.

     

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